Entrevue Cocktail

Article posté par ΨYoko.
Paru le dimanche 23 mars 2008 à 00:00
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Entrevue Cocktail



qu'elle puisse donner et recevoir de la tendresse et de l'amitié. Moi-même, par expérience personnelle, j’apprécie plus la tendresse reçue, même du féminin, que l'amour lui-même; parce que l'amour est une loi naturelle tandis que la tendresse c'est une loi d'amitié. L'amitié c'est beaucoup plus important. Dans "Les Titans", l'album suivant "La Frontière de la vie", une tendresse toute particulière naît entre Yoko et Xunk et, heureusement que Xunk était un insecte sinon on m'aurait accusé de chose trop spéciale. Cela aurait fait penser à l'amour entre un colibri et une girafe. (rires). J'ai déjà élevé des abeilles chez moi, et je me suis dit: "Pourquoi les insectes ne souffriraient pas, ayant comme nous un coeur, un système nerveux". Xunk était rejeté par les siens, on le laissait mourir tout doucement, il a alors un sentiment pour Yoko, une petite créature qui, elle, ne le méprise pas.
C- A la fin de "Les Titans", vous citez: "Les formes qui différencient les êtres importent peu, si leurs pensées s'unissent pour bâtir un univers": Pouvez-vous commenter?
RL- Je crois que si on n'a pas une vision optimiste de la science, il n'est plus possible de vivre à notre époque. Nous sommes dans une société de techniciens de la science. Si j'habitais dans un pays du tiers-monde, je parlerais d'une autre façon, et je ne ferais certainement pas de la bande dessinée. Nous avons la chance d'être dans une société moderne. Essayons donc de mettre la science du côté de l'humanité et non contre. Aussi l'aventure chez moi vient souvent du robot qui échappe à l'homme et non de l'homme qui utilise les robots contre l'humanité.
C- Vous travaillez un peu dans le sillage de Jacobs, mais vous n'avez pas la même vision de la science.
RL- Pour ce qui est de Jacobs, il est un fait que nous n'avons pas eu la même jeunesse. Il est une chose certaine, on raconte toujours ses souvenirs, ses phantasmes d'enfance. Pour Jacobs, la crainte des guerres était liée à la science tandis que pour moi, l'épanouissement de la science se faisait au service de la paix. Je rejette la bombe atomique. Je connais aussi les retombées de la science d'après-guerre. Je connais bien Edgar Jacobs, c'est un grand bonhomme, mais il ne faudrait pas lui demander d'enlever une bougie dans son auto, tandis que moi j'aime bricoler. Je fais de l'aéromodélisme, le côté scientifique m'a toujours paru positif, tandis que lui peut-être il le redoute... Je ne sais pas.
C- Vous avez créé les Vinéens, que sont-ils pour vous?
RL- L'important avant tout, c'est que je voudrais qu'ils existent. J'ai imaginé que les Vinéens, ce peuple à la peau bleue était venu sur la terre, qu'un vaisseau

s'était échappé de Vinéa. Puis là, je m'engage sur une pente savonneuse, je vais me faire des détracteurs. On va dire: « Oh la la, lui avec cette nouvelle philosophie ». J'ai fait un rapprochement qui voulait que les enfants vinéens et les singes auraient donné le point de réflexion. Je cherche une explication plausible de la présence de l'intelligence sur la terre. Auparavant on pensait que les Martiens étaient verts alors que maintenant on sait qu'ils sont un tas de cailloux. De plus en plus il faut aller chercher des civilisations sur des planètes beaucoup plus lointaines. Sur la terre, on a découvert toutes les Amazonies. Fini les mystères. Alors on part au-delà des étoiles pour trouver l'évasion. J'ai écrit une fois une chose à ce sujet, c'était je crois de l'écriture automatique: « Au delà de l'infini, il y a l'infini. Au delà du Divin il y a le Divin connu. Si vite court la pensée de l'homme pour se fixer une frontière, il la voit reculer sans cesse, inaccessible. Mais il trouve sa foi dans la certitude qu'il ne débouchera jamais sur le néant car le néant n'existe pas. »

a quelque chose de plus: une recherche d'amitié. Yoko est un peu la grande soeur que je n'ai pas eue. L'amie à qui je peux me confier. C'est un peu la magie de donner la vie à un être à part entière. Yoko prend vie de plus en plus par le lecteur puis à mesure qu'elle a pris cette vie j'ai eu besoin d'une troisième dimension: la pensée. J'ai donné à Yoko un mental pour qu'on croit davantage qu'elle existe. Elle pense elle vit. Elle rêve. On se rend compte qu'elle est différente parfois, notamment dans "La Proie et l'ombre". Différente parce que moi aussi j'ai connu des Yokos, j'ai travaillé avec des Yokos, surtout avec une Yoko qui n'a pas du tout la tête de Yoko. J'ai vu des gens se battre pour Yoko, pour moi, pour obtenir certaines choses. Je ne dirai pas vendre la série de Yoko mais pour passer vers le média. Cela laisse des traces, et on transpose automatiquement ses expériences sur son personnage. Je crois que Yoko sera beaucoup plus vivante plus intérieure, plus près de la réalité. Je ne recherche pas à la revoir en réalité malgré qu'ici au

C- Pensez-vous qu'au cours de la vie de Yoko des événements inattendus pourront surgir et changer le cours de sa vie?
RL- Evidemment, si je parle de tout ça, je dévoile aussi ma vie secrète. La question posée il me faut bien jouer le jeu. Il est un fait que lorsqu'on a créé une héroïne de bande dessinée, on fait d'abord un petit personnage pour faire de l'action. Bon. On a du succès. On vend des albums. On est content. Puis le personnage nous dépasse. On se rend compte instinctivement que Yoko, on ne peut plus s'en passer. Qu'une journée où l'on a pas dessiné Yoko, c'est une journée où on a l'impression de ne pas avoir fait quelque chose de valable. Quand on en a marre de certaines discussions, que ça va mal dans la vie familiale on se réfugie dans son personnage. On est heureux surtout à sa table de dessin. On sent qu'il y

Québec on m'en ait donné un exemple frappant en Caroline Arsenault. J'ai été stupéfait, mais à la longue l'effet s'est estompé, la personnalité de l'individu, heureusement, reprend toujours le dessus.
C- Pensez-vous que vos lecteurs particulièrement épris de l'aspect scientifique de votre oeuvre ont pu être déçus du côté policier de "La Proie et l'ombre"?
RL- Je ne crois pas. Il y a d'ailleurs un élément scientifique; le fantôme au laser. C'est un album différent. C'est du policier à la Agatha Christie avec une ambiance à la David Hamilton sans les amitiés particulières, j'insiste. C'est un monde très féminin, plus en frou-frous, plus en douceur, moins technique, moins mécanique. J'ai écrit un livre

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